«Le deuxième semestre s’annonce clairement plus compliqué»
A moins d’une prolongation décidée par la Confédération, les entreprises ont jusqu’à la fin du mois de juillet pour faire la demande de prêt dit Covid auprès de leur établissement bancaire. Le point avec Frédéric Bigler, responsable Entreprises à la BCN.
La BCN s’attend-elle à une hausse des demandes de prêts, juste avant cette échéance du 31 juillet?
Frédéric Bigler : Le premier jour, nous avons reçu quelque 190 demandes de prêts. Certains avaient la crainte que l’argent mis à disposition ne suffise pas à répondre à tous les besoins. On sait aujourd’hui que ce ne sera pas le cas. D’ailleurs, des PME avaient rempli leur formulaire par prudence et ont déjà remboursé leur prêt, partiellement ou en intégralité, notamment pour pouvoir échapper aux conditions relativement strictes imposées par la Confédération, par exemple en ce qui concerne l’interdiction de verser des dividendes ou la limitation des investissements. D’ailleurs, je recommande aux entreprises de se mettre une petite alerte dans leur agenda en novembre : il sera alors temps, avant le bouclement des comptes, de faire le point individuellement sur cette question du remboursement. Pour répondre à votre question, plus de 1000 entreprises ont déjà soumis leur demande, nous ne nous attendons donc pas à une vague pour l’échéance de fin juillet, néanmoins à quelques demandes complémentaires.
Le report d’amortissement a-t-il été demandé par beaucoup d’entreprises?
Oui, clairement, c’était une mesure simple que de nombreuses sociétés ont utilisée.
On sait que la région, à propension manufacturière, va également souffrir en deuxième partie d’année. Que disent les entrepreneurs que vous rencontrez?
C’est difficile de généraliser. A la reprise des activités en avril-mai, les entreprises industrielles ont retrouvé très progressivement un certain niveau d’activité, mais elles s’appuyaient alors sur des commandes arrivées avant la pandémie. Le deuxième semestre s’annonce clairement plus compliqué, les entrepreneurs ne voyant que peu de signaux de retour des commandes. Les modalités de paiements vont inévitablement se resserrer entre les acteurs, je les invite toutefois à maintenir un certain niveau de confiance entre eux pour éviter d’amplifier la crise. Dans la construction, c’est un peu différent, car les projets de rénovation ont pu être maintenus et les nouvelles constructions s’articulent autour d’un cycle plus long.
Justement, du côté des projets, certains ont-ils fait fi du coronavirus?
C’est vrai que cette période est déstabilisante. Certains ont revu leurs plans, d’autres, lorsque le projet était sur les rails et le fruit d’une profonde réflexion, sur plusieurs années, ont poursuivi. Dans les transmissions d’entreprise, la crise ne change rien à la problématique du vieillissement, le processus prend néanmoins un peu plus de temps et doit tenir compte des impacts de la crise actuelle, ceci tant pour l’acquéreur que pour la société vendue.
Dans une période de crise comme celle que nous vivons, le rôle du banquier change-t-il quelque peu?
Oui, les sollicitations sont particulièrement nombreuses. Souvent, le patron d’une PME, par exemple de 20 collaborateurs, peut se sentir isolé face à la situation inédite qu’il vit. Notre rôle d’écoute et d'appui s’en trouve encore renforcé. Le deuxième semestre sera compliqué car nous ferons tout pour jouer notre rôle de soutien à l’économie régionale, mais, un peu à l’image du médecin qui s’est préparé au pire lors de cette crise sanitaire, nous devrons nous aussi affronter des situations économiquement, mais également humainement très compliquées.